Vestric - Vergèze : Il y a de l'orage dans l'air ...
Vestric une histoire banale, bientôt ancienne.
Voies de garages, poste d’aiguillage, embranchements pour l’usine Perrier et la station EDF, mais rien ne passe.
Pourtant, il y a moins de cinq ans de cela, un agent était présent tous les matins pour reprendre la commande du poste, former deux trains chargés venant de chez Perrier, à 6h et 14h, et restituer à l’usine les wagons vides. Sa tâche était également administrative puisqu’il devait s’occuper de l’enregistrement, de l’étiquetage des wagons et des contrats fret; tout cela dans le bureau qu’il partageait en gare de Vergèze Codognan avec la guichetière.
(la gare de Vergèze Codognan vue direction Montpellier)
Mais tout ceci est du passé.
Le poste d’aiguillage est aujourd’hui en permanence télécommandé par celui de Saint-Césaire ; l’agent de Vestric parti depuis à la retraite n’a pas été remplacé ; les voies de garages sont envahies par les herbes ; l’aiguille qui permettait d’accéder à la station électrique a été enlevée et les bouteilles de la première marque mondiale d’eau gazeuse ne partent plus que par camion.
(la gare de Saint-Césaire) (la Sous-station EDF)
Alors pourquoi ?
Cela ne peut pas s’expliquer par une baisse d’activité, car le Perrier se vend toujours aussi bien et l’entreprise ne désespère pas que son eau à bulles reparte un jour par les rails, puisqu’elle effectue un entretien régulier sur ses installations ferroviaires.
(A gauche les voies SNCF, au centre les voies de garages et à droite l'embranchement Perrier)
La réponse est peut-être de l’autre côté des voies de garages de Vestric, sur les voies principales qui joignent Nîmes à Montpellier. En effet, ici le trafic est l’un des plus chargé de France pour une ligne classique et les différents projets de contournement TGV des deux villes ne sont encore qu’à l’étude. La ligne manquerait donc de temps et d’espace pour ses trains fret ?
L’explication est plausible mais un doute subsiste. Il y a cinq ans, quand les « Perrier » circulaient encore, le trafic était équivalent à celui d’aujourd’hui, et bien qu’étant de fait très chargé en journée, il reste normal voire faible la nuit.
Alors certes l'argument est à retenir, mais depuis des dizaines d'années, les différents gouvernements n’ont eu de cesse de fermer les petites lignes peu fréquentées par les voyageurs, au nom de la sainte « rentabilité ». Mais ces décideurs ont oublié qu'une entreprise ferroviaire avait d’autres fonctions que de faire du transport collectif. Leurs installations servaient également à faire transiter des trains par d’autres parcours que les lignes à forte fréquentation, pour une meilleure fluidité du trafic.
La fréquence des circulations n’est certainement pas la principale cause des maux de Vestric.
Celle-ci date probablement de 2005 lorsque l’Etat décida d’ouvrir à la concurrence l’activité fret. Ce qui autrefois était la principale force d’une entreprise de services publics en détenant le monopole, est devenu la comptabilité non-bénéficiaire d’une multinationale dans un secteur libéralisé.
Pour l’expliquer autrement, la SNCF est une entreprise publique mais aussi un groupe comprenant plus de 600 filiales principalement dans le transport routier et ferroviaire.
Et quand la SNCF ne décroche pas un contrat, s’il ne va pas à un de ses concurrents, il tombe dans le giron de l’une des ses filiales.
Autant vous dire que qu’en voulez faire des réductions de personnels et réorienter majoritairement votre production vers la grande vitesse, la brèche est toute trouvée.
De cette politique, Vestric en a fait les frais mais elle n’est pas un cas isolé, juste le reflet d’un système à la dérive.
Ici il y a du gaz dans l’eau mais l’histoire devient conforme, lisse comme partout en France où le capitalisme a pris le pas sur l’écologie et l’asphalte sur les rails.
Et quand tout est uniforme, l’eau devient plate, imbuvable et c’est à ce moment précis qu’il y a de l’eau dans le gaz.
(1981 : un locotracteur manoeuvre sur l'embranchement "Perrier" à Vergèze)